Mise en garde de l’INRS contre l’ozone : les fabricants ripostent
Dans un communiqué daté du 14 septembre 2023, l’institut national de recherche et de sécurité (INRS) a émis une mise en garde contre l’utilisation de l’eau ozonée dans les opérations de nettoyage et d’entretien des textiles, en raison des effets potentiels sur la santé des travailleurs exposés. « Dans les conditions normales de température et de pression, l’ozone se présente sous la forme d’un gaz, rappelle l’organisme. C’est un agent d’oxydation puissant, très réactif et instable. L’inhalation de fortes concentrations de ce gaz peut provoquer des lésions respiratoires sévères. Une exposition répétée à de faibles concentrations peut être à l’origine de symptômes proches de l’asthme. » Pour Annabelle Guilleux, experte en prévention des risques chimiques à l’INRS : « Les effets possibles d’expositions répétées à de faibles concentrations d’ozone et éventuellement à d’autres substances formées lors du procédé de génération de l’eau ozonée soulèvent des interrogations pour la santé des travailleurs ».
Les fabricants réagissent
Cette alerte n’a pas manqué d’interpeller les fabricants de générateurs d’ozone, qui s’opposent aux conclusions de l’INRS sur la dangerosité de leurs dispositifs. S’ils ne contestent pas les risques générés par l’ozone et reconnaissent l’existence sur le marché de générateurs dangereux, tous assurent de la fiabilité de leur système. A commencer par Tersano du groupe Ecolife qui annonce « respecter les directives de l’OSHA et être certifié par UL/CSA et TUV U081503 », des organismes internationaux dédiés aux questions de sécurité. « Grâce à la chambre de dégazage intégrée dans nos dispositifs, l'émission de gaz d'ozone et autres radicaux libres potentiellement nuisibles est nulle […] La technologie de Tersano se distingue par un filtre déshydratant à tamis moléculaire. Le filtre a une porosité élevée qui lui permet d'absorber de grandes quantités d'azote. Nous utilisons un séparateur d'azote et d'oxygène très puissant dont la durée de vie testée coïncide avec le comptage qu'il maintient également. » Quant à l’eau ozonée, le fabricant indique « Notre eau ozonée stabilisée est un mélange d'eau pure avec une concentration minimale d'ozone, ne dépassant jamais la Valeur Limite d'Exposition Professionnelle (VLEP) fixée par l’INRS pour l'ozone dans l'air. Nos tests montrent une concentration d'environ 0.034ppm, bien en dessous des limites préconisées par l’INRS. »
Paredes qui annonce être finaliste des Trophées des Objectifs de Développement Durable 2023 du Pacte mondial des Nations Unies, dans la catégorie « Innovation Durable »,pour son dispositif Paredes Blue Lab Laundry, rappelle que celui a été évalué sur des critères très précis correspondant aux objectifs de développement durable de l’ONU. « Pour sa solution, Paredes Blue Lab Laundry n’utilise pas directement de l’ozone mais une eau ozonée. » Les tests réalisés en conditions réelles en blanchisserie par Tera Environnement, un laboratoire indépendant, ont démontré « une concentration résiduelle d’ozone à l’échelle du μg (microgramme) dans le local impliqué soit une valeur 1000 fois inférieure au seuil de tolérance. » Paredes dispose par ailleurs de l’autorisation de l’Anses pour commercialiser sa solution en France. Gaches Chimie, précurseur de l’eau ozonée en blanchisserie, a emboité le pas aux deux autres fabricants en publiant un communiqué sur son système « Nos générateurs Garotek assurent une production d’ozone stable, avec une faible concentration pour respecter les valeurs VLEP imposées par la réglementation soit 0.2 ppm sur 15 min ou 0.1 ppm sur 8 heures. Lors des installations, les équipes techniques de Gaches Chimie prennent le soin de mesurer les concentrations d’ozone (en ppm) tant dans le local qu’à proximité des équipements.Pour sécuriser les installations et les opérateurs, nous disposons de capteurs mesurant les émissions d’ozone dans les locaux et nous sommes en mesure de collaborer avec des experts pour valider l’innocuité de nos installations. »
Une efficacité remise en question
« A ce jour, indique l’INRS, les résultats publiés par les fabricants qui commercialisent ces équipements ou dispositifs à base d’eau ozonée ne sont pas conformes aux exigences de la norme NF EN 14885 et ne permettent donc pas de démontrer leurs revendications d’efficacité en désinfection de surface, de textile ou de vaisselle », souligne l’INRS. Aussi l’institut recommande aux entreprises d’opter pour les opérations de nettoyage à l’aide de procédés physiques ou chimiques classiques, en sélectionnant les produits les moins dangereux et les techniques de nettoyage les moins exposantes ou en cas de nécessité de désinfection, d’avoir recours à des procédés ou des produits à l’efficacité démontrée contre les micro-organismes ciblés. Des affirmations que contestent les principaux fabricants, mettant en avant des normes bactéricides, virucides, fongicides et sporicides obtenues. Un débat loin d’être clos qui se poursuivra dans les prochaines semaines et devrait clarifier l’intérêt et les risques potentiels de l’usage de l’ozone en blanchisserie.